Winter Family est un duo de musiciens composé de Ruth Rosenthal et Xavier Klaine.

Ruth Rosenthal, née à Jérusalem, est une artiste israélienne diplômée de la Visual Theater School of Jerusalem. Elle a été performeuse, marionnettiste, créatrice lumières dans un très grand nombre de spectacles au sein de la bouillonnante scène indépendante d’ Israel. Elle a ensuite travaillé à l’Opera National de Tel-Aviv (lumières) pendant plusieurs années et a été cuisinière dans de nombreux restaurants Jerusalémites et Tel Aviviens.

Xavier Klaine est un musicien né à Maxéville à la périphérie de Nancy. Bassiste dans deux groupes de l’underground lorrain : Blockheads (Grindcore) et Alive the Roupettes (Rock Indé), il est titulaire d’une médaille d’or de piano et de musique de chambre au CRR de Nancy. Il a suivi un 3e cycle en géographie politique et culturelle à l’Université Paris IV-Sorbonne, a enseigné le piano en Lorraine et à Paris, et a cumulé les petits boulots dans la restauration.

Ruth Rosenthal et Xavier Klaine se sont rencontrés à Jaffa en Israel en 2004 et ont fondé Winter Family. Ils jouent une musique minimale, obsessionnelle, abrasive, politique et à fleur de peau qualifiée parfois de Weird Wave ou Funeral Pop. Ruth psalomodie et scande ses textes en hébreu et en anglais (spokenword), joue de la batterie et des machines, Xavier joue des harmoniums, du piano et des grandes orgues. Leur fille Saralei les rejoint parfois sur scène jouant des machines et de la flûte traversière. Winter Family a publié plusieurs albums sur les labels référence Sub Rosa (Bruxelles), Alt.vinyl (Newcastle) et Ici d'Ailleurs (Nancy) et ont fait plus de 380 concerts dans des églises, des galeries d’art, des musées, des clubs, des salles de rock et des squats à travers le monde : Chine, Japon, Usa, Canada, Israel, Europe.

Ils ont travaillé avec des metteurs en scène (Arthur Nauzyciel, etc), des chorégraphes (Paco Dècina, Damien Jallet, etc), des cinéastes (Sebastien Betbeder, Blaise Harrisson, Ami Livne, Philippe Petit, etc) des plasticiens (Yochai Matos, Maïder Fortuné, Yael Perlman, Olivier Mirguet, etc) et ont signé les musiques de quelques publicités (Parfum Chanel, L’UE). En 2011, prolongeant un atelier radiophonique enregistré à Jérusalem pour Radio France Culture, ils ont créé la performance de théâtre documentaire 'Jerusalem Plomb Durci - voyage halluciné dans une dictature émotionnelle', lauréate du festival 'Impatience' au Centquatre à Paris, invité au Festival d'Avignon puis en tournée internationale pendant 3 ans (Allemagne, Belgique, Japon, Canada, Italie, Suisse, France, Pologne). De 2010 à 2012, ils ont séjourné grâce au programme Villa Médicis - Hors les Murs à Brooklyn, New York puis ont décidé d'y prolonger leur séjour afin de fabriquer 'No World / FPLL', leur deuxième spectacle de théâtre documentaire. 'No World / FPLL' a été créé en mars 2015 lors du festival 'Programme Commun' du Théâtre Vidy à Lausanne. Il a été co-produit également par le 104-Paris, où Winter Family étaient artistes associés et le Festival d’Avignon. Ce spectacle controversé a tourné jusqu'en 2016. Ce travail de recherche autocentré sur l'ultra-connection et la bourgeoisie culturelle subventionnée, indignée et privilégiée à laquelle Winter Family appartient a donné lieu à la publication de 'No World', un livre-cd publié aux Editions Dis/Voir (Paris). En 2016 ils élaborent avec la vidéaste Yael Perlman un spectacle sonore et visuel ‘Sodom’ dont la création a eu lieu dans la cour du Musée d'Art et d'Histoire du Judaïsme dans le cadre de la 'Nuit Blanche' à Paris.

Ils retournent alors s’installer à Tel Aviv et enregistrent leur troisième album'South from Here', paru en février 2017, suivi par une série de concerts en Europe, en Israel et au Japon. Ils réalisent ‘Celebration’, un dispositif massif, sauvage, illégal et répété d’installations de drapeaux palestiniens et israéliens entremêlés dans les rues et sur les monuments de Jérusalem et Tel Aviv afin de tenter de banaliser l’idée de paix dans les imaginaires ultra militarisés israéliens. En 2018, ils créent ’H2 Hebron’ leur 3eme spectacle de théâtre documentaire s’appuyant sur 500 pages de témoignages récoltés sur le terrain parr Winter Family en Palestine occupée par Israel. H2 Hebron a été co-produit par Vooruit Gent, Vidy-Lausanne, Nanterre-Ameniers, TNB, MC93, CDN Orleans, ABC-La Chaux de Fonds. Ce spectacle est encore en tournée. Winter Family publie en décembre 2020 le vinyle ‘Chevaliers-music for a dance piece by Paco Dècina’ (grandes orgues, voix) sur le label Sub Rosa et enregistre actuellement ‘On Beautiful Days’, leur quatrième album, entre Paris et Maxéville.

PATRIARCAT
Vivre en confinement éternel

Winter Family

La question que nous nous sommes posée pour notre quatrième spectacle, outre le fait de faire ou non un nouveau spectacle, était : comment parler du patriarcat ? Sujet à la une de l’actualité médiatique et omniprésent sur les réseaux de nos société privilégiées.

Ce sujet nous perturbe depuis le tout premier soir de notre rencontre il y a 17 ans, à Jaffa, qui a été l’occasion pour Xavier d’offrir ce soir-là à Ruth un monologue au ton professoral et paternaliste d’une longueur mémorable sur la situation politique au Moyen Orient. Ruth, née, elle, à Jérusalem, en était restée alors sidérée.

Après de longs mois d’errance coupable nous avons pris la décision de traiter ce sujet comme nous avions traité l’occupation israélienne en Palestine : de façon documentaire. Collecter des matériaux sonores et visuels sur le terrain / sélectionner, éditer, restituer ce matériau de façon plus ou moins désincarnée sur le plateau. Mais cette fois le terrain de recherche allait être non pas les autres, mais nous-mêmes, notre propre famille nucléaire : un père (homme blanc cisgenre approchant la cinquantaine), une mère (femme cisgenre un peu plus jeune), une adolescente (fille unique woke & connectée).

Nous avons pris la décision d’ausculter notre propre famille pendant plusieurs mois. Nous plaçons plusieurs enregistreurs dans notre appartement afin de capter ces moments intimes et de capter la banalité du mâle patriarcal au sein de notre cellule familiale.

Puis Ruth s’est emparée de cette matière première pour sélectionner les épisodes les plus remarquables, à ces yeux, de ce patriarcat domestique, faisant entièrement confiance au filtre traumatique de sa colère sourde. Elle entreprend alors, seule, un travail de transcription-réécriture. Il s’agit ici du geste central et primordial de cette création. Les dialogues colonisés par l’homme sont ensuite redit afin d’être enregistrés de façon plus ou moins désincarnés par Ruth et Xavier et seront diffusés pendant toute la première partie du spectacle via un système audio offrant une écoute intime aux spectateurs.

Les entretiens avec notre entourage sur les logiques patriarcales perdurant au sein de nos familles soit disant ‘éclairées’ nous ont absolument montré qu’au-delà de notre famille, le problème était bien réel partout autour de nous. De nombreuses femmes ont accepté de nous relater quelques conversations privées et anecdotes qui tendent à prouver que les choses ne changent pas ou trop peu, pas assez vite en tous les cas.

Les nombreux live de confinement d’une grande indécence, offerts à la face des non-artistes confinés réduits aux rôles de voyeurs pendant le printemps 2020, édulcorant une réalité de façon embarrassante voire pornographique nous ont motivés à prendre cette décision : faire ressentir et partager avec les spectateurs l’effroi gênant né des mécanismes du patriarcat domestique à l'œuvre dans les familles. A commencer par la nôtre. Un anti live de confinement.

CRÉATION
21, 22 et 23 septembre au CDNO